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Richard III et Amathia, deux semi-déceptions au Théâtre de la Cité

by Julien
Amathia et Richard III au théâtre de la Cité (Toulouse)

Ce mois-ci, je suis allé voir deux pièces au Théâtre de la Cité. Je n’y ai pas consacré d’articles particuliers, parce que je préfère parler ici des spectacles que je recommande et qui m’ont vraiment touché. Mais Richard III de Shakespeare mis en scène par Guillaume Séverac-Schmitz et Amathia de Sonia Belzkaya mis en scène par Dominique Habouzit m’ont laissé vraiment perplexe… Retour sur deux semi-déceptions.

Richard III, tragédie grotesque

J’ai déjà parlé du travail de Guillaume Séverac-Schmitz sur ce site, à propos du Tartuffe qu’il avait mis en scène en 2021. J’avais déjà été partagé par cette lecture du chef-d’œuvre de Molière que j’avais trouvée peu nuancée. Mais je me suis dit que j’allais laisser une deuxième chance à ce jeune metteur en scène qui monte. J’ai donc pris ma place pour aller voir Richard III, qui est l’une de mes pièces préférées.

Le point positif, c’est qu’on ne s’ennuie pas. Cette version a beau durer 3h10, on ne les sent pas passer. Les acteurs sont à leur maximum et le rythme est assez soutenu. Les libertés avec le texte sont cependant un peu faciles et superfétatoires. Thibault Perrenoud qui incarne Richard est excellent dans le registre de la bouffonnerie. Et en effet, il y a de ça chez ce monstre couronné. Avec Shakespeare, le sublime frôle presque toujours le grotesque. C’est dans son ADN. Oui mais… Où est passé le pouvoir de séduction de ce manipulateur hors pair ? À trop forcer sur le côté grand-guignol, je n’ai absolument pas cru aux scènes au cours desquelles le redoutable Richard III retourne les têtes et les cœurs de son entourage. Le grotesque est partout. Le sublime et le tragique presque nulle part.

Richard III Severac Schmitz © Erik Damiano
Richard III mis en scène par Guillaume Séverac-Schmitz © Erik Damiano

J’ai en revanche beaucoup aimé les scènes au cours desquelles la reine Margaret (Julie Recoing) maudit tour à tour ses adversaires. Quel charisme ! Ses apparitions sont les seules scènes au cours desquelles j’ai ressenti un peu de sincérité dans le jeu – avec la scène de la mort d’Edouard IV.

Auprès des ados, le spectacle a été une totale réussite. Les retours des plus jeunes sont hyper enthousiastes, comme ils l’avaient été pour Tartuffe. Pour ma part, je ne me précipiterai aux prochaines créations signées Guillaume Séverac-Schmitz, je vais lui laisser quelques années pour que ses mises en scènes prennent un peu de profondeur et de maturité.

Amathia, une hiérarchie des priorités

La mise en scène de ce spectacle repose sur une idée bien trouvée : ce sont les profs qui tiennent les murs de l’Éducation Nationale, institution en pleine déliquescence. Pour Dominique Habouzit, ce constat est pris au pied de la lettre. Dans cette magnifique scénographie, les enseignants sont pétrifiés dans les murs et tentent de faire tenir la maison alors que tout s’effrite et qu’à chaque minute des pans s’écroulent et des morceaux de plafond viennent se fracasser sur le sol.

Amathia © Manuel Buttner
Amathia © Manuel Buttner

Passée la bonne idée visuelle, que garder de ce spectacle qui se veut politique ? Pas grand chose… Le texte est d’une pauvreté navrante. Une fois alignée la liste des dysfonctionnements et des absurdités sur système, que fait-on ? À aucun moment Amathia ne semble désigner les responsables de la situation. Qui a voulu que l’École devienne ce qu’elle est aujourd’hui ? Qui a intérêt à ce que les professeurs soient broyés par le système ? À qui profite le crime ?

Bref, je suis sorti d’Amathia avec le sentiment d’avoir vu un spectacle qui est passé à côté de son sujet. Pour moi, un théâtre politique n’est pas seulement un théâtre qui constate, c’est aussi un théâtre qui accuse. Bien que la pièce soit courte (1h10) j’ai souvent ressenti des longueurs et j’avais hâte de rentrer chez moi.


Et vous, avez-vous vu ces deux spectacles du mois de novembre au Théâtre de la Cité ?

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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.

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