Avec un peu de retard, le voici, le voilà : le bilan culturel du mois de juin ! Le premier mois de l’été est toujours important culturellement, car c’est à ce moment-là que les saisons se clôturent et que les prochaines se dévoilent. En attendant de découvrir les beaux projets culturels de 2024-2025, on fait déjà le bilan du mois écoulé. C’est parti !
Chantier Shakespeare, par les compagnies Silencio et Incandescente
Trois nanas pleines d’énergie tentent de nous raconter en 1h top chrono 3 pièces de Shakespeare : Le Songe d’une nuit d’été, Hamlet et Macbeth… Mission impossible ? Pas pour ces comédiennes (Emma Gautrand, Elfi Forey & Luna Julien Escobar) qui avec quelques bouts de carton et une imagination débordante nous transportent dans les univers shakespeariens. Une gageure !
Toiles Étoiles, par le Ballet du Capitole de Toulouse
Le Capitole réinvente 3 ballets pour lesquels Picasso avait créé des rideaux de scène. J’ai particulièrement été hypnotisé par L’après-midi d’un faune, revisité par Wang Ramirez, dans lequel le rideau de scène devient un voile dansant. Telle une méduse ou un papillon, la toile se contracte et se déploie au rythme de la musique et de la respiration des danseurs.
Le Train Bleu a quant à lui pour rideau de scène une reproduction à l’identique de Deux femmes courant sur la plage de Dinard (La Course) de 1923. J’ai adoré les premiers tableaux de ce ballet, inspirés de l’univers balnéaire et de la natation.
Le dernier ballet était le plus folklorique, pour lequel les danseurs du Capitole ont dû être spécialement formés aux techniques du flamenco. Le public est immergé dans un tablao, un lieu espagnol à l’ambiance intime, exclusivement destiné aux spectacles de flamenco. Olé !
Tartuffe, à deux, de Molière par Nathalie Barolle
Quelle interprétation ! Je n’aurais jamais cru que 2 acteurs seulement suffiraient à jouer toute la pièce du Tartuffe imaginée par Molière. Mais Nathalie Barolle et Philippe Boisdron sont passés maîtres dans l’art du transformisme, et il leur suffit d’un rideau derrière lequel se glisser pour passer en un instant d’un personnage à l’autre. Bravo pour la performance !
Qui som ? de Baro d’evel
Avant de partir vers Avignon, Baro d’evel a présenté en avant première son nouveau spectacle Qui som ? au Théâtre de la Cité de Toulouse. Un spectacle dans la lignée de Là et Falaise, dans lequel on retrouve aussi certains motifs de La Cachette (notamment l’utilisation de la poterie). Poétique, drôle, émouvant aussi, ce spectacle produit en nous une myriade d’images : la mer, le tour du potier, l’histoire de l’humanité… Une petite fille et un chien ponctuent les tableaux qui se succèdent, spectateurs de cette odyssée spectaculaire.
Eugène Onéguine, de Piotr Illitch Tchaïkovski mis en scène par Florent Siaud
En voyant que Stéphane Degout était à l’affiche de cet opéra dont il jouait le rôle titre, je n’ai pas pu résister à l’envie d’aller voir Eugène Onéguine. Comme Boris Godounov que nous avons vu en début de saison, l’opéra Eugène Onéguine est inspiré d’un récit de Pouchkine. Son héros fait partie de ces personnages à la fois odieux et charismatiques que l’on adore détester. Stéphane Degout l’incarne à merveille, et la mise en scène était vraiment sublime. Une fin de saison très réussie !
Le Petit chaperon Uf, d’après Jean-Claude Grumberg et Joël Pommerat
Chaque année, les élèves de quatrième de la Classe à Horaire Aménagés Théâtre du collège Hubertine-Auclert présentent leur travail. Cette année, ils ont travaillé autour de la figure du Petit Chaperon Rouge, un conte revisité par Jean-Claude Grumberg (Le Petit Chaperon Uf) et Joël Pommerat. On voit que les élèves adorent être sur scène et leur plaisir est communicatif ! Bravo à eux.
Ô ciel la procréation est plus aisée que l’éducation, de Sylvain Levey
Après les quatrièmes, ce sont les troisièmes de la CHAT d’Hubertine-Auclert qui ont présenté leur travail. L’an dernier, les élèves avaient travaillé sur Michelle, doit-on t’en vouloir d’avoir fait un selfie à Auschwitz du même Sylvain Levey. Ce dramaturge contemporain mérite décidément d’être connu. Et on sent que ses textes parlent aux élèves – aussi bien qu’aux spectateurs. Bravo à tous ces comédiens en herbe !
L’homme le plus flippé du monde, 1. Petites terreurs du quotidien, de Théo Grosjean
Théo Grosjean, né en 1995, n’a connu aucune guerre et sa courte vie n’a été le théâtre d’aucun drame majeur, ce qui n’est pas très pratique pour écrire une biographie. Après quelques années d’études à l’école Émile-Cohl, il entame sa carrière d’auteur de bande dessinées avec Un gentil orc sauvage. Son existence sous les signes du malaise et de l’anxiété lui inspire par la suite une série autobiographique, d’abord publiée sur Instagram, dont L’Homme le plus flippé du monde est le premier tome en version papier.
La Bombe, d’Alcante, Bollée et Rodier
La Bombe est un énorme roman graphique (450 pages) entièrement en noir et blanc. Cette œuvre raconte dans quel contexte, comment et par qui la bombe atomique a pu être développée (et utilisée en août 1945). Au fil des chapitres, on découvre les coulisses et les personnages-clés de cet événement historique : des mines d’uranium du Katanga jusqu’au Japon, en passant par l’Allemagne, la Norvège, l’URSS et le Nouveau-Mexique, c’est une succession de faits incroyables mais vrais qui se sont ainsi déroulés, un impressionnant travail d’enquête et de reconstitution.
Tout est ici racontés à hauteur d’hommes : décideurs politiques (Roosevelt, Truman), scientifiques passés à la postérité (Einstein, Oppenheimer, Fermi…) ou acteurs majeurs demeurés méconnus, tels Leó Szilàrd (le personnage principal de cet album, un scientifique qui remua ciel et terre pour que les USA développent la bombe, puis fit l’impossible pour qu’ils ne l’utilisent jamais), Ebb Cade (un ouvrier afro-américain auquel on injecta à son insu du plutonium pour en étudier l’effet sur la santé) ou Leslie Groves (le général qui dirigea d’une main de fer le Projet Manhattan) – sans oublier, bien sûr, les habitants et la ville d’Hiroshima, reconstituée dans La Bombe de manière authentique.
C’est un livre très touffu que j’ai trouvé bien plus intéressant que le film Oppenheimer qui a connu un grand succès l’été dernier sur nos écrans.
Romuald et Julienne, de Brigitte Moreau
C’est la première fois que je lis une œuvre qualifiée de micro-roman. Le titre est assez transparent j’imagine : Romuald et Julienne est une réécriture de la tragédie de Roméo et Juliette. Les deux protagonistes sont de jeunes amoureux, mais leurs familles respectives se détestent.
Contrairement aux amants de Vérone, Romuald et Julienne décident d’interroger leurs parents pour connaître l’origine de cette animosité respective… jusqu’au surgissement de secrets enfouis que les amoureux auraient peut-être préféré ignorer.
Universal War One – tome 1 : La genèse, de Bajram
UW1 est un classique de la bande dessinée de SF. La Genèse plante le décor et présente les personnages qui seront au cœur de la série pendant les 6 tomes qui la constituent. Alors que l’humanité a colonisé l’univers, un immense mur de ténèbres apparait soudainement autour d’Uranus. Un mur en forme de sphère de 3 milliards de kilomètres de diamètre… Les membres de l’escadrille Purgatory, sous les ordres de la capitaine Williamson, vont devoir percer ce mystère cosmique et faire leurs preuves pour échapper à la cour martiale, qui leur a laissé un dernier sursis avant leur condamnation.
Avec ses magnifiques dessins et son récit touffu, Bajram m’a illico embarqué dans l’univers de UW1 dont j’ai hâte de découvrir les autres tomes.
40 ans, de Frédéric Taddeï
Ce petit recueil compile tout ce que les personnes célèbres ont fait – ou pas – à 40 ans. C’est ainsi que l’on apprend qu’à cet âge, Oscar Wilde fit jouer L’Importance d’être constant, Jean Rochefort s’est fait pousser la moustache, Dalida a chanté Paroles, paroles, Christophe Colomb a découvert l’Amérique, Bill Gates est devenu l’homme le plus riche du monde, Michel Houellebecq a reçu le prix de Flore mais était encore méconnu du grand public, Kim Kardashian a divorcé de Kanye West, Jeannie Longo a obtenu son 7ème titre mondial, Beethoven a fait jouer son Concerto n°5 pour piano alors qu’il est devenu sourd, Hugo Pratt a créé le personnage de Corto Maltese dans La Ballade de la Mer salée, Gabriel García Márquez a écrit Cent ans de solitude, Bernard Lavilliers est entré pour la 1ère fois au Top 50 avec Noir et blanc, Simone de Beauvoir a publié Le Deuxième sexe, Ovide a écrit les Métamorphoses, Mark Twain a écrit Tom Sawyer, Truman Capote a écrit De sang froid, Kafka est mort de la tuberculose, Vatel s’est suicidé, Jack London est mort d’un empoisonnement du sang et Edgar Poe est mort après avoir mystérieusement disparu 4 jours… Entre autres anecdotes croustillantes.
Et vous, qu’avez-vous vu et lu de beau au cours du mois de juin ?
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.