J’ai eu la chance cette semaine d’assister à la dernière représentation de la pièce La Nuit se lève au Théâtre Sorano. Ce spectacle écrit par Mélissa Zehner et interprété par la compagnie Les Palpitantes aborde avec une délicatesse saisissante (voire même avec humour, parfois) le thème de l’inceste. Cette œuvre théâtrale, inspirée notamment du podcast Ou peut-être une nuit de Charlotte Pudlowski et du livre Le berceau des dominations de Dorothée Dussy, offre une perspective intime et puissante sur un sujet souvent tu.
La Nuit se lève : cinq femmes face à leur passé
Réunies lors d’une soirée en hommage à une amie défunte (Lisa), cinq femmes, membres d’une association d’aide aux victimes d’inceste nommée “La Nuit se lève”, voient ressurgir les traumatismes de leur enfance. À travers leurs récits et leur amitié, elles plongent dans les souvenirs des abus sexuels subis au sein du foyer familial (le père, le grand-père, le beau-père…).
La pièce explore comment ces femmes tentent de trouver une issue, un souffle d’air, pour se reconstruire et briser le cycle du silence. La pièce a également la vertu d’éduquer le public sur ce sujet très sensible, sans tomber dans le moraliste ou la pédagogie ennuyeuse.
Une mise en scène hybride et musicale
Mélissa Zehner & Les Palpitantes proposent une mise en scène mêlant récits, chants, musique, rap et danse. La représentation du 6 février 2025 était d’ailleurs suivi d’un concert et d’une boom dans le foyer du Théâtre Sorano.
Cette approche kaléidoscopique rend la violence palpable tout en conservant une profonde tendresse. Les cinq comédiennes incarnent avec justesse et sensibilité ces femmes en quête de résilience, offrant une expérience chorale saisissante de justesse et étonnamment pleine de vie. Franchement, j’étais loin d’imaginer que je rirais en allant voir un spectacle sur un sujet aussi délicat.
Un acte de résilience collective
Au-delà de la représentation des traumatismes individuels, La Nuit se lève met en lumière la puissance de la sororité et du partage pour surmonter les blessures du passé. La pièce dénonce la fabrique du silence qui entoure l’inceste et célèbre le pouvoir réparateur de la parole et de la musique. C’est une œuvre salvatrice et vivifiante qui invite le public à une réflexion profonde sur la résilience et la solidarité.
Hantée par le silence entourant les violences sexuelles, Mélissa Zehner s’engage à travers cette œuvre à briser les tabous et à ouvrir un espace de dialogue et de guérison. D’ailleurs, une fiche de salle nous invite à prendre contact avec toutes les structures pouvant venir en aide aux personnes victimes ou témoins d’incestes (Innocence en danger, L’enfant bleu, ASQF, France Victimes 31… vous pouvez cliquer sur les liens pour découvrir les pages de chacune de ces associations).
En somme, La Nuit se lève est une pièce bouleversante qui, sans jamais tomber dans le pathos, offre une lueur d’espoir et de résilience face à l’indicible. Du théâtre comme on l’aime et comme on veut en voir plus souvent.
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.