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Ahouvi : un couple, une ex et un border collie au Théâtre Garonne

by Julien
Ahouvi de Yuval Rozman © Frederic Lovino

Ahouvi, qui signifie « mon amour » en hébreu, est une pièce de Yuval Rozman que j’ai eu l’occasion de voir hier soir au Théâtre Garonne. Dans un espace en forme de ring, Ahouvi explore les méandres d’une relation amoureuse entre un Français, Virgile, et une Israélienne, Tamar. Le spectacle offre une introspection profonde sur les dynamiques complexes de l’amour et de la séparation.

Ahouvi : une histoire d’amour intense et tumultueuse

La pièce retrace l’évolution de la relation entre Virgile & Tamar, depuis leur rencontre passionnée après les attentats du 13 novembre 2015 jusqu’à leur séparation douloureuse. À travers le récit des deux amants, le public est invité à revivre les moments clés de leur histoire, mêlant passion, conflits et introspection. Leur border collie, Ookad, occupe une place centrale sur scène, symbolisant à la fois le lien qui les unit et le témoin silencieux de leur délitement.

On le comprend en filigrane : les épisodes de cette histoire d’amour, souvent anecdotiques, sont aussi un moyen pour Yuval Rozman (auteur et metteur en scène), de parler du désamour progressif de la France et d’Israël.

[La France] est mon pays refuge mais j’ai peur de ne plus pouvoir rester ici. Je ne vois plus la France avec les mêmes yeux, avec le même regard, que quand je suis arrivé. Je ne sais pas où elle est. Je la cherche. J’ai besoin de parler d’amour parce que je suis encore ici. J’ai besoin de parler d’amour pour me préparer au moment où l’on se séparera, au moment où rien ne sera plus pareil.

Yuval Rozman

Une mise en scène immersive et originale

Yuval Rozman propose une mise en scène immersive, plaçant le public au cœur de l’intimité du couple. Avec son dispositif quadri-frontal, la scénographie évoque un ring de boxe qui souligne la dualité de la relation, oscillant entre amour et affrontement. Les acteurs, accompagnés de la présence vivante du chien sur scène, font de leur mieux pour rendre palpable la tension et la tendresse qui caractérisent leur histoire.

Ahouvi de Yuval Rozman © Frederic Lovino
Ahouvi de Yuval Rozman © Frederic Lovino

Mais l’utilisation de micros (malheureusement de plus en plus fréquente au théâtre), crée une distance entre les comédiens et les acteurs, empêchant l’émotion authentique de parvenir jusqu’à nous. Un choix étonnant dans une salle comme celle du Théâtre Garonne dont l’espace n’est vraiment pas immense. Mais le fait que les acteurs tournent systématiquement le dos à 1/4 du public a peut-être motivé ce choix.

Peut-être aussi que le fait que les personnages soient également peu sympathiques et que chaque scène soit toujours un poil trop longue (la scène du premier date, celle du vidéoprojecteur, les chansons, la twingo-pédalo – qui donne un peu la gerbe à force de tournicoter –, le dernier monologue…) a favorisé le décrochage du public. La dramaturgie aurait sans doute mérité un petit rabotage de 30 minutes afin de gagner en efficacité.

Une réflexion sur l’identité et l’altérité

Au-delà de la simple histoire d’amour, Ahouvi interroge les notions d’identité, de culture et de différence. La relation entre Virgile et Tamar devient le miroir des tensions culturelles et personnelles, offrant une perspective sur les défis – insurmontables ? – de l’amour interculturel. La pièce aborde également la question de l’étranger et de l’appartenance, thèmes chers à Rozman, lui-même Israélien vivant en France.

Né en 1984 à Tel Aviv, Yuval Rozman a fait ses études au Conservatoire national de Tel Aviv. Ses œuvres, souvent centrées sur le conflit israélo-palestinien et les questions d’identité, ont été présentées sur diverses scènes internationales. Ahouvi est le troisième volet de sa Quadrilogie de ma Terre, précédé par Tunnel Boring Machine et The Jewish Hour.


En somme, Ahouvi est une œuvre qui mêle intimement les thèmes de l’amour, de l’identité et de la culture, offrant au spectateur une expérience théâtrale originale. Ce samedi soir est la dernière occasion pour découvrir ce spectacle au Théâtre Garonne, où il sera rejoué à 20h30.

Qui a écrit cet article ?

culture déconfiture Julien

Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.

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