Hier soir, l’Aria de Cornebarrieu a fait salle comble pour le spectacle de Mehdi Djaadi Coming out dans lequel l’artiste se livre sur sa conversion religieuse. Dans un one man show en forme de confession, le comédien-auteur propose un stand up autobiographique souvent drôle mais aussi émouvant, dans lequel le rire panse des blessures intimes et profondes.
Le coming out d’un catholique converti
Vous l’aurez compris (ou pas), dans Coming out on ne parle pas de sexualité mais bien de spiritualité. Pardon si le titre du spectacle vous a mis sur une fausse piste. Pourtant, il est bien question pour Mehdi Djaadi de sortir d’un placard, de briser un tabou, de s’assumer tel qu’il est à travers ce seul en scène. Né en France de parents algériens, Mehdi fut éduqué dans la foi et les traditions musulmanes. C’est pourtant aujourd’hui un trentenaire catholique qui monte sur scène et qui fait de son cheminement spirituel le sujet de son spectacle. Pour les catholiques, c’est un converti. Pour les musulmans, c’est un apostat.
Issu de l’École supérieure d’art dramatique de Lausanne, son parcours artistique l’a aussi amené à fréquenter de près des milieux progressistes et athées… bref, dans sa famille comme dans sa profession, Mehdi Djaadi est un ovni. Mais cette singularité, aussi inconfortable soit-elle, est peut-être aussi l’un des objets de sa quête à la fois spirituelle et identitaire.
À travers une galerie de personnages hauts en couleur, tous inspirés des personnes qu’il a rencontrées sur son parcours, il nous raconte sa vie, ses peurs, sa rédemption.
Une quête de sens
De sa jeunesse à aujourd’hui, la quête de Dieu semble avoir été une constante dans la vie de Mehdi Djaadi. Bien que les trois Religions du Livre adorent le même dieu – qu’elles désignent toutes sous des noms différents – il a choisi de renoncer à l’islam pour embrasser le catholicisme (en passant d’abord par la case du protestantisme). Clairement, les figures de Jésus et Marie ont joué un rôle prépondérant dans cette conversion, comme si leur promesse d’amour inconditionnel répondait à une faille profonde, une blessure qui aujourd’hui encore transparait dans son spectacle.
Mais là où l’histoire pourrait virer au pathos, Mehdi Djaadi a décidé d’en faire une comédie. Car au-delà du récit strictement autobiographique, son témoignage essaie surtout de tordre le cou aux préjugés de la société sur les religions (en particulier l’islam et le catholicisme). Des musulmans salafistes et antisémites aux catholiques d’extrême droite ou royalistes, tout le monde en prend pour son grade. Le monde du show business hypocrite et complaisant n’est pas épargné non plus. Et Mehdi Djaadi est bien placé pour parler de tous ces spécimens puisqu’il les a tous rencontrés.
Ces personnages nauséabonds en côtoient d’autres plus sympathiques, comme un pasteur d’origine camerounaise, des partenaires de scène en cours de théâtre, des petites frappes de banlieue et autres cathos tradi (que personnellement j’appelle les MST, pour « mocassin serre-tête »). Bref, c’est un joyeux festival qui défile sous nos yeux pendant l’heure et demi de ce Coming out.
J’ai particulièrement aimé les articulations entre les “épisodes” de cette vie rocambolesques, notamment lorsque Mehdi Djaadi interprète des chants religieux musulmans et chrétiens : l’Adhan (appel à la prière musulman, qui m’a rappelé mon récent voyage aux Émirats en plein Ramadan) et le Salve Regina (antienne dédiée à la Vierge Marie). Dès qu’on cesse de parler de dogmes pour en revenir aux sens, je suis immédiatement beaucoup plus sensible aux questionnements de la foi. On a également senti dans la salle, lors de ces passages contrastés, une écoute… religieuse !
Si vous ne connaissez pas encore Mehdi Djaadi, son spectacle Coming out sera de nouveau joué dans les prochains mois. Il sera à l’Olympia le 16 juin 2023 et de retour à Toulouse au Casino Barrière le 24 janvier 2024.
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.
