C’est désormais un principe : je ne passe plus jamais un été sans lire un roman de Robert Merle ! Il y a deux ans, c’était Malevil – qui a été le déclencheur d’une passion pour cet auteur. L’an dernier, j’en ai donc lu deux : La Mort est mon métier et Les Hommes protégés, deux chefs-d’œuvre chacun dans leur genre. Cette année, la lecture de L’Île m’a confirmé que Robert Merle était définitivement l’un de mes auteurs français préférés.
Des Révoltés du Bounty à L’Île de Robert Merle…
Suite à une mutinerie en mer, l’équipage d’un navire britannique se trouve dans l’impossibilité de revenir en Angleterre. En effet, pour cette révolte les marins seraient jugés et condamnés à mort. Afin d’échapper à cette sentence, ils décident donc de rester dans le Pacifique et de fonder leur propre société sur une île au large de Tahiti, qu’ils vont partager avec des Tahitiens et des Tahitiennes pour y refaire leur vie.
Pour ce récit de 700 pages, Robert Merle s’est inspiré de l’histoire des Révoltés du Bounty (1789) et de ce qu’il advint d’eux à Pitcairn, l’île polynésienne où ils s’installèrent pour échapper à la justice britannique. Mais L’Île n’est pas un roman historique ni une enquête sur ces événements, sur lesquels on ne sait finalement que peu de choses… En effet, ne nous sont parvenus que des témoignages indirects sur ce qui s’est réellement passé à Pitcairn à la fin du dix-huitième siècle. Merle a donc imaginé d’autres personnages et brodé toute une intrigue sur une île de fiction dont il ne donne jamais le nom dans son livre.
Bien que l’inspiration lui soit venue d’après des événements réels, tout n’est donc que fiction dans ce livre.
Robert Merle, sondeur intransigeant de l’âme humaine
Comme dans ses autres romans, le récit qui nous est fait ici est surtout un prétexte à sonder l’âme humaine dans ce qu’elle a de plus sombre et de plus lumineux, les rapports sociaux, les inégalités entre les sexes ou les ethnies (ici, les Britanniques et les Tahitiens). Le personnage central, Purcell, va tout tenter pour préserver l’harmonie dans cette île du bout du monde et donner la chance à chacun de monter ce qu’il a de plus juste et de plus beau en lui. Mais des hommes ordinaires (Polynésiens et Européens) peuvent-ils vraiment surpasser leurs différences pour vivre ensemble sans que l’expérience ne vire à la tragédie ?
Une fois n’est pas coutume, Robert Merle m’a totalement happé par la puissance de son style et celle de ses idées, qui nous prennent souvent à rebrousse poil. Par exemple, si je vous demande si vous êtes contre la peine de mort, vous n’aurez pas de mal à me donner vos excellentes raisons (éthiques, morales, etc.). Mais dans cette île, Merle parvient à imaginer des situations qui vont ébranler même l’humaniste le plus convaincu. Et le lecteur par la même occasion. À travers la micro-société qu’il a imaginée, ce sont nos croyances et nos stéréotypes qu’il interroge sans jamais sombrer dans le manichéisme. Même les héros ont leurs instants de doute et leur part d’hypocrisie. Même les pires salopards peuvent faire preuve de grandeur d’âme et de générosité.
La lecture de ce roman me donne vraiment envie de découvrir l’intégralité des œuvres écrites par Robert Merle qui s’est aventuré dans des genres très différents toujours avec brio. Un animal doué de raison est déjà en attente sur ma table de nuit mais je sais qu’il a aussi écrit de nombreux autres romans. Lequel me conseillez-vous pour poursuivre ma découverte de sa bibliographie ?
Qui a écrit cet article ?
Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.