Mourad Merzouki est renommé pour sa créativité et son talent dans le monde de la danse contemporaine et urbaine. Il a fondé la compagnie Käfig en 1996, qui a contribué de manière significative à l’évolution de la danse hip-hop en la fusionnant avec d’autres formes artistiques. Parmi ses précédentes créations, on peut citer Pixel qui a marqué les esprits par son mariage innovant entre danse hip-hop et mapping vidéo et dont je vous avais parlé ici-même. Cette performance visuelle a rencontré un grand succès et a contribué à asseoir la réputation de Mourad Merzouki en tant que chorégraphe avant-gardiste. Depuis 2015, j’essaie de voir à peu près tous ses spectacles. Parfois le plaisir est intact, parfois c’est la déception… Et jeudi soir, j’ai vu l’une de ses dernières créations, Zéphyr. Un top ou un flop ?
Un zéphyr trop léger…
En tant qu’admirateur de Mourad Merzouki, je ne peux m’empêcher d’éprouver des sentiments mitigés à propos de son dernier spectacle, Zéphyr. J’ai toujours été fasciné par la créativité et le talent de la compagnie Käfig dans le domaine de la danse contemporaine et urbaine, mais mon enthousiasme habituel a cédé la place à une certaine déception. Bien que la salle ait été debout et que le spectacle ait connu un énorme succès, je suis ressorti avec un sentiment d’incompréhension face à cet engouement général. Certes, l’image était travaillée de manière très élaborée, mais à mes yeux, cela semblait se faire au détriment de l’émotion et de la qualité de la performance.
L’aspect le plus décevant pour moi était la synchronisation des danseurs, qui semblaient souvent – pour ne pas dire systématiquement – en avance ou en retard. Cette dissonance a impacté l’expérience globale, car je considère que la précision est essentielle pour une performance artistique réussie. Je ne cherche pas la synchronisation à tout prix, mais force est de constater que quand c’est bien fait, ça produit un effet de dingue (à cet égard, Contemporary Dance 2.0 d’Hofesh Shechter avait été une claque, souvenez-vous). En revanche, quand c’est raté – comme dans Zéphyr – c’est assez ennuyeux à voir…
Contrairement à Pixel, Folia et Agwa où j’avais trouvé une harmonie entre la virtuosité technique, l’expression émotionnelle et l’innovation artistique, dans Zéphyr tout cela m’a cruellement manqué. Quant à la musique d’Armand Amar, qu’est-ce qu’elle est lisse… un mélange de musique du monde et de Richard Clayderman (ou Sofiane Pamart – choisissez votre plaie). Tout cela m’a paru bien consensuel, voire inconsistant.
La compagnie Käfig a encore remporté le suffrage du public
Malgré cette déception personnelle, je reconnais la subjectivité de l’appréciation artistique, et il est évident que Zéphyr a connu un succès public indéniable. Chacun a sa propre interprétation de l’art, et peut-être que d’autres spectateurs ont trouvé dans cette performance une profondeur et une signification qui m’ont échappé… Mais c’est vrai qu’à aucun moment je n’ai cru à ce vent que les danseurs prétendaient sculpter ou contre lequel ils faisaient semblant de lutter. Mon voisin de fauteuil semblait tout aussi perplexe que moi lorsque les applaudissements et les hourras ont retenti dans la salle.
En fin de compte, bien que Zéphyr ne soit pas parvenu à satisfaire pleinement mes attentes, cela ne remet pas en question mon admiration continue pour le talent et l’audace créative de Mourad Merzouki. L’art, par nature, suscite des réactions diverses, et cette expérience m’encourage à continuer de suivre le parcours artistique de ce chorégraphe exceptionnel, en espérant retrouver dans les spectacles à venir la même magie et exigence technique qu’à ses débuts.
Photo de couverture © Laurent Philippe
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.
2 comments
Nous avons vu zéphyr hier soir et nous avons également été déçu sûrement car nous savons dont est capable merzouki, nous surprendre et nous émouvoir.
Une musique qui ne capte pas le spectateur, de la performance certes mais qui semble manquer de construction et de but.
La partie où les danseurs luttent ensemble contre le vent s’éternise et nous essouffle malheureusement.
Oui, on est d’accord. Mais je reste étonné de la réaction de salle (à Toulouse, ce fut une ovation tous les soirs), alors qu’en discutant au cas par cas avec des spectateurs, c’est le même retour déçu qui est ressorti… Je me demande qui est cette majorité qui acclame.