Home À visiter Notre-Dame : À la cathédrale que j’ai connue

Notre-Dame : À la cathédrale que j’ai connue

by Allychachoo
Notre-Dame À la cathédrale que j’ai connu

J’avais 10 ans, un voyage à Paris avec mes parents, un tour au Louvre et devant Notre-Dame, 2 monuments emblématiques dans lesquels je devais passer des heures et des heures d’apprentissages passionnants des années après. J’ai une photo avec mon petit frère sur le parvis de la cathédrale, c’est drôle pour deux ex-étudiants en histoire. J’y ai pensé tout de suite hier soir quand j’ai vu apparaître, incrédule, l’image de la cathédrale en flammes.

Ça serait mentir que de dire que Notre-Dame est ma référence absolue en matière d’architecture médiévale. Si connue, si bondée, si galvaudée peut-être parfois. Elle n’a jamais été mon intime majestueuse comme la basilique toulousaine de Saint-Sernin. Elle ne m’a pas éblouie par surprise comme le si beau bleu des vitraux de la cathédrale de Chartres dans laquelle il n’y avait personne. Elle n’a pas ses murs gorgés de souvenirs d’enfance comme la modeste église Saint-Junien de Nouaillé-Maupertuis. Elle ne m’a pas frappé la rétine comme la vision extraordinaire de la mosquée bleue et de la basilique Sainte-Sophie depuis la place Sultanahmet à Istanbul. Mais Notre-Dame.

Notre-Dame c’est la laborieuse. Réellement découverte lors de mes études d’histoire de l’art à l’école du Louvre, des heures de tdo (travaux dirigés devant les oeuvres pour les non-initiés 😉 ) à connaître son histoire, ses spécificités architecturales, et surtout ses techniques. Des heures encore plus nombreuses à m’y rendre seule, à me creuser les méninges la tête en l’air en scrutant ses voûtes pour tenter de comprendre l’art délicat de son architecture, de sa maçonnerie, de ses forces et tensions qui l’ont façonnée. La visite avec mon homme où enfin j’avais pu expliquer ce que j’en avais compris, savoir qui n’est pas resté intact dans ma mémoire mais qui m’aura profondément marqué dans son apprentissage. Un bâtiment qui s’apprend, qui se laisse découvrir, qui peu à peu s’ouvre. Allez savoir pourquoi je me suis acharnée là-bas. Je voulais comprendre.

Des années après, encore, j’ai souvent arpenté son parvis. En allant chez mon coiffeur, je sortais exprès à la station de RER de Saint-Michel pour passer par l’île de la cité. Et à chaque fois, j’avais un sentiment de quiétude fou. Même quand je pressais le pas sous la pluie, je regardais ses tours. Je me rappelais ce que j’avais appris et que je ne savais plus. L’envie toujours là, jusqu’à la fin de ma vie, qu’un jour j’aurais un pote gardien et que j’irais dans les endroits inaccessibles. Le petit trip qui dans ta tête te rappelle ta lecture des Piliers de la terre et te dit “non mais la construction, ça devait être ouf”. Le sentiment que les vieilles pierres nous ancrent dans la continuité.

Alors aujourd’hui dans les cendres, on a quoi ? L’impression de vivre une drôle d’époque, une sale époque, où la destruction de Notre-Dame sonne comme un signe de fatalité. Voyez-vous, même sans la folie des hommes, on détruit. Rien ne nous sera épargné. Ce n’est pas le divin en moi qui est touché, je ne suis pas croyante. Mais les lieux sacrés ont ceci d’unique au patrimoine qu’ils touchent l’essence humaine, si humaine, de l’espoir.

Je sais. Peut-on être triste pour de vieilles pierres quand chaque jour nous entendons des histoires humaines tragiques ? Avons nous le droit d’avoir le cœur serré pour du patrimoine ? Je sais. Il n’y a pas de blessés, la structure est préservée, Notre-Dame sera reconstruite et cet accident ne sera qu’une douloureuse étape de sa longue, longue histoire. Je sais. Ce n’est qu’un article émotif d’une amatrice de vieilles pierres. Bientôt nous débattrons de la restauration, on se tirera dans les pattes à propos du style à lui donner, on rejouera à l’infini le jeu de “pour ou contre l’interprétation de Viollet-le-Duc ou n’importe quel autre architecte”. L’Histoire suivra son cours.

À la cathédrale que j’ai connue et qui n’est plus.

À la cathédrale de demain que j’aimerais faire découvrir à mes enfants et mes petits-enfants.

Qui a écrit cet article ?

Tous ses derniers articles

Le nez dans les bouquins, le cœur dans les musées, les jambes à l'assaut du patrimoine et l'esprit en voyage ! Je partage avec vous mes découvertes culturelles du moment, diverses et variées, sans prise de tête. Éclectisme, je crie ton nom !
Serial blogueuse, retrouvez moi aussi sur mes blogs famille & lifestyle, Famille en chantier et Line&Color

You may also like

2 comments

Catherine 17 avril 2019 - 0 h 55 min

Très beau témoignage, très sincère et touchant, magnifiquement écrit… merci ! je partage…

Reply
Allychachoo 22 avril 2019 - 17 h 57 min

Merci Catherine <3

Reply

Leave a Comment

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.