Je suis récemment retourné au Musée des Beaux-Arts de Bordeaux. C’est un musée dont j’aime beaucoup les collections permanentes et l’affiche de leur exposition temporaire Absolutly Bizarre m’a donné envie d’y retourner. Je vous propose donc ma sélection des plus belles œuvres de ce musée.
Le portrait de Francis Hare, dit Master Hare
L’un des premiers tableaux qui m’ont marqué est ce portrait signé Sir Joshua Reynolds, qui fait partie de l’actuelle exposition temporaire consacrée aux maîtres britanniques, British Stories. Quand il peignit cette œuvre à l’extrême fin de sa carrière, Reynolds était conscient de la qualité de ce portrait du jeune Francis Hare âgé d’à peine trois ans. Il fit réaliser une gravure du tableau qu’il titra Enfance, accordant ainsi une valeur emblématique à ce chef-d’œuvre de sa maturité.
Deux chèvres dans un paysage aride
Ne me demandez pas pourquoi ces deux biquettes m’ont tapé dans l’œil ! Je les avais déjà adorées lors de ma première visite du musée il y a quelques années et je ne passe jamais devant elles sans les contempler quelques minutes… Etonnant, non ?
Phèdre et Hippolyte
Vous n’ignorez pas que j’adore la pièce de Racine sur ces deux personnages mythiques. Ici, le geste d’Hippolyte et le regard de Phèdre sont d’une théâtralité absolue ! Ayant vu l’admirable version de François Gremaud très récemment, j’ai regardé cette toile avec un regard particulièrement amusé !
Mozart expirant
Il n’y a pas que de la peinture au Musée des Beaux-Arts de Bordeaux. On peut aussi y voir quelques magnifiques sculptures. J’adore tout particulièrement celle de Mozart expirant, dont la finesse est remarquable. On devine jusqu’à la maille des bas qui couvent ses pieds, et la dentelle de son col est plus vraie que nature.
L’œuvre se situe dans la tradition de la sculpture funéraire italienne qui inspira d’autres artistes français contemporains comme Henri Allouard et son Molière mourant de 1882 et Pierre-Jospeh Rambaud et son Berlioz mourant de 1892.
Les héritiers
Eugène Buland est assez rare dans les collections françaises, malgré sa carrière officielle prestigieuse. Le tableau de Bordeaux, sans doute son chef-d’œuvre, témoigne de sa vision d’un naturalisme presque néo-classique.
Il n’égale pas mon chouchou, Emile Friant, mais je trouve quand même que ses tableaux sont magnifiques !
L’autoportrait d’Alfred Roll
Les autoportraits de peintres, j’adore ça ! C’est autre chose que les selfies d’aujourd’hui, non ?
Le Pont-Neuf, la nuit : un nouveau dépôt du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux !
Je trouve ce nouveau tableau absolument sensationnel. Il est incroyablement surprenant, car on dirait une magnifique photographie avec un peu de recul, mais lorsqu’on se rapproche, on se rend compte que tout n’est que taches et gros aplats.
Le peintre a immortalisé le Pont-Neuf de Paris dans des séries puissantes : tantôt sous la neige, tantôt dans la brume. Les paysages nocturnes sont beaucoup plus rares dans sa production. Les lignes de force sont simples : la diagonale nous mène de la Samaritaine illuminée au début du Quai de Conti. Une symphonie de bruns et de noirs est traversée par les illuminations multicolores de l’éclairage artificiel. Les enseignes lumineuses, posées de façon radicale, comme des extraits de couleurs pures, sont une ode au métier du peintre. L’artiste soumet l’ensemble de sa vision du monde aux trois couleurs primaires : le rouge, le jaune et le bleu.
Trait de dévouement du capitaine Desse, de Bordeaux, envers le Colombus, navire hollandais
Ce tableau gigantesque évoque un haut fait de la marine bordelaise. Le capitaine Desse parti de Bordeaux à bord de la Julia croisa le 13 juillet 1822 un navire hollandais le Colombus, pris dans la tempête qui lui avait enlevé le grand mât, l’artimon, le beaupré et le gouvernail. Durant cinq jours, il sauva les 92 membres de l’équipage.
Ce sujet de la mer terrifiante que l’homme affronte dangereusement convient parfaitement à Gudin qui se spécialise dans les représentations des marées fracassantes des orages, des incendies, des naufrages et des paysages marins que Théophile Gautier qualifie de “shakespeariens”. Gudin compose une scène dramatique au cœur d’une gigantesque vague qui entraîne le Colombus, formant la diagonale du tableau tandis que la Julia apparaît à l’arrière-plan. L’artiste reconnaît :
Entraîné par la beauté du sujet, j’ai fait ce tableau plus grand qu’il ne m’était commandé.
Dans cette marine romantique, Gudin, premier peintre à porter le titre de peintre officiel de la Marine royale, exalte la figure du héros et rend hommage à son frère, peintre comme lui, qui mourut dans un naufrage.
Absolutly Bizarre, l’expo de l’été au Musée des Beaux-Arts de Bordeaux
Je n’ai pas beaucoup aimé les tableaux de cette exposition, qui est pourtant celle dont l’affiche m’a donné envie de revenir au Musée des Beaux-Arts de Bordeaux… Mais je dois admettre qu’au premier étage de l’exposition, trois toiles ont tout de même retenu mon attention !
Le peintre William West s’inspire ici des grands succès de Francis Danby dans cette scène biblique évoquant l’Exode du peuple juif dans le désert sous la conduite du prophète Moïse. La grande colonne de lumière qui représente la puissance divine apparaît sur d’autres compositions de Danby ou de Colman.
Coucher de soleil sur la mer après une tempête
Voilà le tableau que j’ai préféré de cette exposition ! Inspirée du célèbre Radeau de la Méduse de Géricault exposé à Londres en 1820, cette scène maritime représente de malheureux naufragés dérivant sur un radeau après la tempête. Le sujet tragique et les tons rougeoyants du coucher de soleil qui intensifient le drame évoquent les peintures de John Martin. Ce tableau remporta un succès considérable à Bristol puis à Londres.
La destruction du Temple
Voilà un grand format digne des meilleurs films catastrophe de nos jours ! Je suis resté très longtemps devant cette toile à regarder tous les détails de la destruction (je vous mets quelques détails en-dessous). Cette allégorie religieuse est très librement inspirée de L’Apocalypse de saint Jean. Samuel Colman représente la colère divine qui s’abat pour détruire une grande église gothique. La peinture est probablement imprégnée des convictions religieuses non conformistes de l’artiste. Elle s’inspire peut-être aussi de l’incendie de Bristol pendant les émeutes de 1831.
Alors, envie d’aller faire un tour au Musée des Beaux-Arts de Bordeaux ?
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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.