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L’Abolition des privilèges, au Théâtre Garonne

by Julien
L'abolition des privileges Maxime Pambet

Hier soir, je me suis rendu au Théâtre Garonne pour découvrir L’Abolition des privilèges, pièce qui relate les événements politiques de l’année 1789, en particulier ceux de la Nuit du 4 août. Ayant passé beaucoup de temps l’an dernier à travailler sur cette période historique (à travers le mythique spectacle 1789 du Théâtre du Soleil), j’étais forcément très curieux de découvrir ce nouveau spectacle et la manière dont l’équipe artistique allait faire résonner ces événements du passé avec notre actualité brûlante.

L’Abolition des privilèges, un écho au présent

La scénographie est d’une simplicité redoutable : le public entoure la scène, chaque gradin représentant un groupe de députés — Noblesse, Clergé et surtout Tiers-État (un seul groupe ayant droit à sa coupette de champagne en attendant le commencement du spectacle, je vous laisse deviner lequel…). Le comédien Maxime Pambet, seul en scène, prend la tribune et incarne tour à tour une dizaine de personnages, vrais orateurs qui ont fait l’Histoire. Ce choix donne au texte une immédiateté troublante : on a l’impression d’assister à l’Assemblée elle-même, avec ses hésitations, ses emportements, ses coups d’arrêt.

Le spectacle n’a certes pas l’ampleur d’un Ça ira (auquel il est difficile de ne pas penser lorsqu’un spectacle veut mettre en scène ces événements), néanmoins Maxime Pambet parvient à lui seul à reconstituer le souffle épique de la Révolution française.

L’Histoire qui s’emballe

Sur scène, la France de l’été 1789 se dessine sans fard : un État en déficit chronique, les plus riches échappant à l’impôt, un régime à bout de souffle et un peuple à bout de nerfs. Le metteur en scène Hugues Duchêne réussit à transmettre la sensation d’un pays en proie à des tensions sociales inédites, jusqu’à ce que, en une nuit, tout bascule. La pièce, minimaliste dans ses moyens, donne le sentiment que l’Histoire s’est soudainement accélérée.

Ce qui rend la proposition d’autant plus intéressante, c’est l’écho contemporain que Duchêne tisse petit à petit. Lors des transitions entre les parties du spectacle, il entre en scène et dialogue avec le comédien pour faire résonner le roman historique de Bertrand Guillot avec d’autres privilèges : blanchité, domination masculine, modes de vie contemporains et enjeux écologiques… Et si tous les privilèges n’avaient pas été abolis ?

Sans lourdeur, la pièce montre qu’une abolition n’est jamais définitive ; les privilèges prennent d’autres formes et il faut sans cesse les nommer pour mieux les combattre.


L’Abolition des privilèges est à voir au Théâtre Garonne jusqu’au 8 novembre prochain. On en sort en pensant à la phrase de Saint-Just, pour qui « la révolution doit s’arrêter à la perfection du bonheur ». Le chemin est donc loin d’être terminé, mais cette Nuit du 4 août, sans être un point final, est une boussole qui nous indique encore la direction à suivre.

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culture déconfiture Julien

Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.

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