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Babylon, un film génial et déjà culte

by Julien
Babylon Damien Chazelle critique

J’ai enfin vu le film phénomène du moment : Babylon. C’est bien simple, c’est une dinguerie absolue. Une œuvre déjà culte. Je savais, en allant voir un film de Damien Chazelle, que j’allais découvrir un sommet de maîtrise. À ce niveau-là, je n’ai pas été déçu. J’étais un peu plus sceptique sur le sujet : un film sur l’âge d’or du cinéma hollywoodien, le passage du muet au parlant… on a le sentiment que de nombreux réalisateurs ont déjà raconté cette histoire. De Boulevard du Crépuscule de Billy Wilder à Ave César ! des frères Coen (dont je vous parlais ici en 2016) en passant par le très français The Artist de Michel Hazanavicius… on a le sentiment que tout a déjà été dit !

Pourtant Damien Chazelle parvient à se démarquer avec ce film-monstre dont l’outrance et la surenchère ne plaira pas à tout le monde.

Babylon, est-ce que trop c’est trop ?

Si vous êtes des lecteurs assidus de Culture déconfiture, vous savez que mon acolyte Charlotte a déjà vu Babylon le mois dernier et nous en a parlé dans un article ici. Et pour elle, c’est sans appel : « trop, c’est trop » ! En effet, Chazelle n’y va pas avec le dos de la cuillère pour nous raconter cette histoire. Une pléïade de superstars (Brad Pitt, Margot Robbie, Max Minghella, Tobey Maguire, Spike Jonze et j’en passe…), un format très long (3 heures 09), une cavalcade d’effets visuels, une ménagerie épatante (un éléphant, un crocodile, un crotale, etc.), bref Babylon assume son parti-pris et son titre ! Ce film est monumental comme la tour de Babylone : tellement gigantesque qu’il risque de s’effrondrer sur lui-même à chaque scène.

image du film Babylon, fête orgiaque avec Margot Robbie dans le rôle de Nelly LaRoy
L’histoire commence par une orgie totalement folle qui donne le ton du film

Oui, on peut dire que ce film est « trop » tout : trop riche, trop long, trop exubérant… Mais c’est justement son propos et sa force. Les années 20 et 30 à Hollywood sont celles où le cinéma et le show-business ne connaissaient aucune limite et expérimentaient tout. Les nouvelles formes de récit, puis l’apparition de la parole et enfin la naissance de la couleur. C’est l’effervescence permanente. Chaque année pendant toute une décennie, le cinéma a été bousculé par des révolutions et a dû se réinventer. Et parmi ses stars, il y a celles qui ont su surfer sur les vagues successives (et toujours plus hautes) et celles qui ont été noyées par le tsunami. Et c’est vrai que pour le spectateur aussi, le film est une super-vague sur laquelle il faut savoir naviguer.

Un casting à la hauteur des ambitions du film

Je rejoins totalement Charlotte qui a salué la prestation de Brad Pitt. Pour elle, « son interprétation de l’acteur vieillissant Jack Conrad est impeccable, naviguant entre le risible et la mélancolie profonde ». Je n’ai rien à ajouter.

image du film Babylon, avec Brad Pitt dans le rôle de Jack Conrad et Jean Smart dans le rôle d'Elinor St John
Dans le show-business, il y a ceux qui savent s’adapter à l’époque… et il y a les autres.

En revanche, je ne dirais pas qu’il est le seul à « sauver » le film. Absolument tout le casting est à sa place et endosse parfaitement le costume. Magot Robbie par exemple. Quelle actrice ! Elle m’avait déjà subjugué dans Scandale, où elle partageait l’affiche avec Charlize Theron et Nicole Kidman. Avec le rôle de Nellie LaRoy qu’elle incarne dans Babylon, elle joue probablement ce qui restera comme l’un des plus grands rôles de sa vie. Perpétuellement dans l’outrance, Nellie LaRoy ne sait être sincère que lorsqu’une caméra tourne et capture son image. J’ai adoré ce paradoxe de comédienne qui ne sait jamais être elle-même, sauf quand on lui demande de jouer un rôle. Quelle virtuosité pour nous faire entrapercevoir derrière ce personnage d’actrice exubérante une jeune femme fragile, déglinguée par une enfance violente dont on ne saura pourtant jamais rien de manière explicite !

photo du film Babylon, avec Diego Calva dans le rôle de Manny Torres
Manny (Diego Calva) est le fil rouge de cette épopée hollywoodienne

C’est d’ailleurs la force de ce scénario : on ne sait rien des personnages et pourtant on devine tout. Toute leur histoire est racontée en filigrane, presque effacée par le mastodonte qu’est le personnage central du film : Hollywood-Babylon. La palme revient à deux personnages principaux : Lady Fay Zhu (Li Jun Li) et Sidney Palmer (Jovan Adepo) qui marquent profondément le spectateur alors que le scénario les fait faussement passer pour des personnages secondaires.

Un réalisateur dont l’ascension n’a pas de limite

Damien Chazelle parvient à se réinventer à chacun de ses films. Son premier film Whiplash l’a fait immédiatement entrer dans la cour des grands (je pense avoir déjà vu et revu ce film plus de 10 fois). La La Land fut une consécration. First man était plus surprenant (je vous en parlais ici en 2018) mais tout aussi épatant sur le plan formel et dans son écriture.

first man
Dans First Man, Ryan Gosling prêtait ses traits à l’astronaute Neil Armstrong

Avec Babylon, Chazelle fait une déclaration d’amour totalement folle au septième art. Pas la déclaration d’amour avec un bouquet de rose et un bon dîner. Pas non plus celle avec le genoux à terre et la bague en diamants. Non, une déclaration d’amour XXL. Celle avec laquelle je t’offre un tour du monde, les couleurs d’un arc-en-ciel et la Tour Eiffel emballée dans du papier d’argent.

Certains disent que le film est long. Moi je dirais qu’il fait durer le plaisir. Distinguo subtil. D’ailleurs, je n’ai pas vu le temps passer, et visiblement les spectateurs qui étaient avec moi non plus puisque la projection s’est achevée dans une salve d’applaudissements, phénomène relativement rare dans un cinéma vous en conviendrez.

Photo du film Babylon, avec Brad Pitt dans le rôle de Jack Conrad et Li Jun Li dans le rôle de Lady Fay Zhu
Brad Pitt et Li Jun Li, un duo attendrissant au cœur d’un système sans pitié

Si vous n’avez pas encore vu Babylon, profitez en tant qu’il est encore à l’affiche. C’est un film qui est clairement fait pour être vu en salle. Ceci dit, il ne devrait pas être enlevé de sitôt puisque hier soir (soit 1 mois après sa sortie) la séance était encore comble.

Et si vous l’avez vu, dites-nous du côté de quel blogueur vous penchez : Julien qui a adoré ou Charlotte qui a été écœurée ?

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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.

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2 comments

Elsa 18 février 2023 - 22 h 05 min

Le début est prometteur et nous embarque dans le tourbillon des années folles, il y a des scènes très drôles et les jeux d’acteurs sont incroyables, Manny est tellement attachant, j’ai adoré. Et Brad Pitt reste un géant du cinéma. Mais ça part vraiment trop dans tous les sens à un moment et certaines scènes m’ont semblées inutilement longues… Et la fin était vraiment too much à mes yeux et j’avais presque hâte que ça se termine. De bons moments, clairement un film à voir au cinéma, mais très mitigée pour ma part !

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Julien 19 février 2023 - 9 h 06 min

Oui, c’est vrai que la longueur des scènes est quasiment une signature. Pour ma part, c’est justement quelque chose que j’ai apprécié. J’adore le fait que chaque scène soit quasiment un court-métrage à elle toute seule (C’est également quelque chose que j’apprécie en littérature, les longues histoires, les longs romans… ou même au théâtre). J’adore être embarqué dans un film exhaustif, qui donne autant sa place aux grandes lignes qu’aux détails “inutiles”. Mais je comprends que pour certains ce soit un défaut, que ce soit justement trop long. Il y a une espèce d’hypertrophie du scénario qui fait que parfois on ne distingue plus ce qui est important et ce qui est “inutile”.

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