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Twin Peaks : The Return, un dénouement

by Julien

CET ARTICLE CONTIENT DES SPOILERS POUR LES SPECTATEURS QUI N’AURAIENT PAS VU LES SAISONS 1 & 2 DE TWIN PEAKS. CET ARTICLE CONTIENT DES SPOILERS POUR LES SPECTATEURS QUI N’AURAIENT PAS VU LES SAISONS 1 & 2 DE TWIN PEAKS.

 

Vingt-cinq ans que les fans l’attendaient : après deux saisons au début des années 90 et un film (Fire walk with me) en 1992, Twin Peaks nous avait laissé sur un cliffhanger extrêmement frustrant. En 2017, la série Twin Peaks : The Return offre enfin un dénouement digne de ce nom à ses spectateurs (mais tout le monde n’appréciera pas) !

 

En résumé : Dans les saisons précédentes, l’intrigue tournait autour du meurtre de Laura Palmer, une lycéenne de Twin Peaks dans l’état de Washington. Pour mener l’enquête, le shérif Truman et l’agent spécial du FBI Dale Cooper s’étaient associés. Avec l’aide du Major Briggs, l’enquête semblait avoir été résolue au cours de la saison 2 : Laura Palmer avait été assassinée par son propre père, possédé par un esprit maléfique nommé Bob, venu d’un monde parallèle. Mais en voulant aller plus loin dans les mystères de ces mondes parallèles (appelés « Loges »), Dale Cooper s’en était retrouvé prisonnier et Bob, sous l’apparence de l’agent du FBI, était revenu à Twin Peaks plein de mauvaises intentions. Dans la Loge Rouge où Dale Cooper était prisonnier, Laura Palmer lui donnait rendez-vous dans 25 ans.

La nouvelle saison de Twin Peaks a donc tenté de prolonger cette intrigue et de développer les thèmes chers à la série : le retour de Dale Cooper dans le monde réel, les manigances de son double maléfique possédé par Bob, les véritables causes de la mort de Laura Palmer, les mystères des Loges découverts par le Major Briggs.

Si les spectateurs ont eu le plaisir de retrouver les personnages qui leur étaient chers, des nouveaux sont venus compléter le casting, notamment la descendance des personnages principaux des saisons 1 et 2.

 

 

Mon avis : Le retour de Twin Peaks était un pari risqué. L’attente des spectateurs était forte et il fallait à la fois répondre aux questions qui se posaient, sans trahir la série et sans donner l’impression de se répéter avec une copie des saisons précédentes. D’ailleurs, il n’est jamais officiellement question d’un « Twin Peaks saison 3 », mais bien d’un « Twin Peaks : The Return », comme une nouvelle série ou un spin-off de la première.

Le premier double-épisode a immédiatement donné le ton. Même si les événements qui se déroulaient manquaient de lien explicite avec la série originelle, on avait le plaisir de revoir des visages connus (quoique vieillis) et des thèmes et motifs lynchiens forts (les rêves, la duplicité, les rideaux…). Les épisodes suivants ont pu dérouter. Le lien entre les personnages à l’écran n’était jamais très explicite, ni le sujet de leurs conversations, rendant le tout de plus en plus abscons pour le spectateur a qui il semblait toujours manquer l’information la plus importante pour comprendre. Beaucoup ont d’ailleurs abandonné la série au fil de ces premiers épisodes, qui donnaient l’impression de vouloir nous perdre toujours davantage sans jamais nous donner ce que l’on attendait.

Finalement, la série a pris un grand virage dans l’épisode 8, presque un métrage surréaliste autonome dans la série. Avec cet épisode radical à l’esthétique digne de Dali, Man Ray ou Buñuel, Lynch nous a montré les origines des mystères de Twin Peaks, comme une expérience extra-sensorielle et poétique. Une sorte d’œuvre d’art contemporaine, conceptuelle et savante. A partir de cet épisode-là, tout ce qui avait semblé confus et sans lien auparavant a commencé à s’éclaircir. Les 10 épisodes qui ont suivi n’ont été que crescendo dans leur intensité et ont permis de connecter tous les nouveaux éléments de la saison 3 avec ceux des saisons 1 et 2 et du film Fire walk with me, avec lesquels Twin Peaks : The Return ne semblait avoir de communs que le titre et la distribution.

Le double-épisode final (17-18) a enfin fini de nous éclairer, avec des scènes du pilote de la première saison et des scènes du film revisitées. Grâce à la magie du montage, c’est toute la série qui a pris une nouvelle signification et nous a invités à une relecture intégrale. Certains personnages des premières saisons semblent avoir joué dans l’ombre un rôle autrement plus important qu’il n’y paraissait (notamment Sarah Palmer). Bien sûr, tous les mystères de Twin Peaks n’ont pas été levés, cela aurait été trop simple. D’ailleurs, alors que l’épisode 17 semble totalement jouer son rôle de dénouement, l’épisode 18 ressemble à s’y méprendre au pilote d’une saison 4 (notamment l’introduction d’un nouveau personnage, Carrie Page, à propos duquel on meurt d’envie d’en savoir davantage). Je dis ça, je dis rien… mais j’espère sincèrement que, si suite il y a, il ne faudra pas encore attendre 25 ans !

 

 

Quelques regrets persistent néanmoins au terme de cette saison 3 que l’on avait tant attendue. Plusieurs personnages semblent n’avoir fait leur retour qu’en guise de clin d’œil et ne servent strictement à rien dans l’intrigue principale. Je pense en particulier au docteur Jacoby, ou à la famille Horne (Ben, Jerry et Audrey). Les errances de Dougie Jones, si elles sont poétiques, finissent par être épuisantes par leur longueur et leur répétition. Quant à la nouvelle génération, on ne comprend pas non plus ce que racontent les scènes dans lesquelles elle apparait : Wally Brando (fils d’Andy et Lucy), Rebecca (fille de Shelly et Bobby) et son mari Steven, Richard Horne (le fils d’Audrey et Mister C)… autant de personnages perturbés et aux préoccupations sans intérêt direct pour l’intrigue principale. On se dit tout simplement que, sans eux, la nouvelle saison aurait gagné en efficacité et en clarté. Mais ce n’était peut-être pas le but recherché.

De plus, quelques problèmes de cohérence subsistent : 1. Comment Audrey Horne peut-elle avoir survécu à l’explosion de la banque dans laquelle elle s’était enchaînée en fin de saison 2 ? 2. Les liens qui unissent Dale Cooper et Diane en saison 3 ne sont pas cohérents avec leurs liens strictement professionnels dans les premières saisons, ni avec les sentiments purs que l’agent du FBI éprouvait pour Caroline puis Annie (personnage totalement volatilisé dans la version 2017). Dommage.

 

 

Malgré tout, cette troisième saison va faire date. Tout d’abord parce que son originalité absolue tranche avec tout ce que l’on connait ou que l’on a connu. Il faut remonter à la première moitié du vingtième siècle (Un chien andalou, 1929) pour trouver des œuvres équivalentes. Ensuite, parce qu’elle complète totalement la « mythologie Twin Peaks » et en devient un jalon essentiel. Enfin, parce qu’avec ses longues séquences et son esthétique sans pareille, cette saison a offert un flot de scènes et d’images cultes qui restent longtemps à l’esprit (et inspireront à n’en pas douter toute une nouvelle génération de cinéastes). Bien que Lynch ait tenté de semer ses spectateurs au cours des premiers épisodes, ceux qui ont su passer le cap de l’épisode 8 ont été pleinement récompensés et se souviendront longtemps de cette saison qui, à mon sens, écrase complètement les autres séries !

 

Et vous, avez-vous regardé cette nouvelle saison de Twin Peaks ? Avez-vous été de ceux qui ont été déroutés ou avez-vous adhéré à ces parti-pris radicaux ?

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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.

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1 comment

EFKAA 15 février 2018 - 17 h 50 min

EFKAA aime Twin Peaks ! Fort !

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