Vous savez que je chronique toujours Joël Dicker. Même si parfois j’ai été déçue, quand La très catastrophique visite du zoo est sorti, je m’attendais à un bon moment de lecture. Spoiler alert : ce fut tout le contraire.
La très catastrophique visite du zoo : le pitch
Titre énigmatique s’il en est, non ? La très catastrophique visite du zoo va parler d’une très catastrophique visite dans un zoo. Et de tout ce qui va mener à cette catastrophique visite. Vous allez devoir attendre un peu : notre narratrice, la petite Joséphine, tient à rentrer dans les détails. Car c’est une sacrée histoire qui va mener une petite troupe d’enfants à tout cela !
Joël Dicker met en scène une classe d’enfants “spéciaux” (comprendre en situation de handicap), qui suite à une sombre affaire de pâte à modeler et de lavabo bouchés se voit contrainte de rejoindre l’école “normale”. La petite Joséphine et ses camarades vont donc se confronter à cette vie si normative qu’est l’école, pensez-donc, mais bien sûr leur super différence va dessiller les yeux de tout le monde. Tolérance, vivre ensemble, démocratie… tout y passe dans cette guimauve.
Un roman “familial” ???
> L’arnaque de La très catastrophique visite du zoo
Alors en fait, figurez-vous que Joël Dicker a voulu écrire un roman pour tous, de 7 à 120 ans. Louable initiative me direz-vous. Mais comment vous dire ce que j’ai ressenti à la lecture de La très catastrophique visite du zoo ? Atterrée serait probablement le bon mot. Non, mais je veux dire : j’ai acheté ce livre au rayon adulte. Je l’ai payé le prix d’une nouveauté parce que je voulais vraiment lire le dernier sorti de Joël Dicker. Quelle victime du marketing littéraire je fais !
Mais alors là… là… Désolée, mais il fallait me le dire que j’ai acheté un livre pour enfant. Car c’est tout simplement un livre pour enfant qui se cache derrière cette couverture classique. Il est vrai que le titre un peu claqué au sol aurait pu m’interpeller. Il m’a interpellé d’ailleurs en vrai, mais je me suis dit “ah voilà, je le trouvais un peu ramollo le Dicker, là le mec va se réinventer”. Alors oui, effectivement rien à voir avec ce qu’il a fait jusqu’à présent. Et c’est un grand non.
> La littérature jeunesse est un vrai métier
Est-ce que le pitch était intéressant ? Oui, très probablement. Je pense effectivement qu’il y avait moyen de faire quelque chose d’intéressant de cette enquête farfelue à hauteur d’enfants. Mais l’enchaînement des chapitres ne prend pas l’ampleur qu’elle aurait pu mériter. Peut-être que pour certains, ça sera un roman à lire en famille pour de vrai. Mais honnêtement, ça m’a tellement gonflé de le lire que je ne le partagerai pas avec mes enfants…
Car n’est pas Daniel Pennac qui veut… On ne s’improvise PAS écrivain pour enfant (ooops, pardon, “familial” on a dit). Car c’est un métier à part entière. Et là, clairement, on sent que notre écrivain a voulu se lancer sur le segment sans en maîtriser les codes… ni avoir la moindre trace de talent naturel sur ce sujet. Désolé Joël. Tout est poussif, avec un style artificiel et une narration plate. Je suis encore à la recherche d’un vrai second degré qui plaira à tous par exemple. C’est un livre très court et croyez-moi : je l’ai senti passer pourtant.
Morale à gros traits et essentialisation du handicap
Jouer avec une morale, c’est effectivement un code habituel du roman jeunesse. Ou “familial” si on reste sur ce mot cher à Dicker. Elle se devine généralement progressivement, sous les touches d’humour et l’angle multigénérationnel. Mais là ? Houlalala, non. La morale ne se devine pas. Elle s’impose avec un premier degré t’as peur. La très catastrophique visite du zoo n’est pas juste vaguement gnangnan et pleine de sentiments, elle est moralisatrice sans la moindre profondeur. Un plaidoyer pour la tolérance beau en théorie mais raté sur le papier.
Et que dire du traitement de ces “enfants spéciaux”, qui étaient si bien à part dans leur classe spécialisée… (rien que ça, pardon mais red flag). Etant donné le sujet, vous vous doutez bien que j’allais être un petit peu pointilleuse. Et ça n’a pas manqué. Vas-y qu’on te sort de l’essentialisation à tous les domaines sur ces enfants si formidables, qui nous apprennent tellement par leurs différences, qui osent dire tout haut ce que les autres pensent tout bas. Le tout en soulignant bien 350 fois dans le roman à quel point ils sont “spéciaux” bien entendu. Tellement “leçon de vie” que même le Téléthon est moins gênant, c’est dire.
Bref. J’ai vraiment le sentiment de m’être fait avoir. Et même, je suis un peu en colère. Parce que Joël Dicker, c’est quand même l’auteur du Livre des Baltimore. Juste l’un des romans qui m’a le plus marqué ces dernières décennies. Je ne sais plus où est l’auteur de ce livre là. En tout cas, pas dans ces dernières parutions et clairement pas dans la littérature jeunesse.
Quant à moi je vous le dis déjà, je n’achèterai pas le prochain Joël Dicker dès sa parution. Chat échaudé craint l’eau froide.
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2 comments
Je n’avais pas l’intention de le lire, et ta critique confirme ça. Mais c’est un régal de lire ta déception !
Le bon côté de cette critique : ça me donne envie de parler de littérature jeunesse ! Histoire de rendre hommage aux spécialistes du genre 😉