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Espaece : espèce d’espace

by Julien

« Vivre c’est passer d’un espace à l’autre, en essayant le plus possible de ne pas se cogner », a pu-t-on lire dans Espèce d’espace de Georges Perec et en exergue du spectacle Espæce d’Aurélien Bory qui en est l’adaptation, ou plutôt la transposition scénique.

Si l’œuvre littéraire est une sorte d’inventaire des différents espaces dans lesquels nous vivons, le spectacle utilise la scène comme un espace transformable à l’envi et démontre comment un lieu unique peut se muer en multitude d’espaces. En guise de décor : un mur qui se déplace et se replie sur lui-même, agrandissant ou réduisant l’espace scénique en un instant, créant des couloirs et des angles obtus en une seconde, quand ils n’existaient pas un instant auparavant… Pour donner vie à cet espace pluriel, des comédiens et des circassiens font bouger les lignes, ouvrent des portes, dansent, se glissent et colonisent les moindres recoins. A l’horizontale comme à la verticale, les personnages mènent une réflexion sur cette drôle d’espèce qu’est l’Homme et son rapport complexe à l’espace. Une espæce, en somme !

 

 

J’aimerais qu’il existe des lieux stables, immobiles, intangibles, intouchés et presque intouchables, immuables, enracinés; des lieux qui seraient des références, des points de départ, des sources :

Mon pays natal, le berceau de ma famille, la maison où je serais né, l’arbre que j’aurai vu grandir (que mon père aurait planté le jour de ma naissance), le grenier de mon enfance empli de souvenirs intacts…

De tels lieux n’existent pas, et c’est parce qu’ils n’existent pas que l’espace devient question, cesse d’être évidence, cesse d’être approprié. L’espace est un doute : il me faut sans cesse le marquer, le désigner; il n’est jamais à moi, il ne m’est jamais donné, il faut que j’en fasse la conquête.

 

 

Aurélien Bory et sa compagnie 111 ont réussi le pari de nous faire faire un voyage immobile, avec certaines scènes de lecture dansée qui m’ont rappelé les plus beaux tableaux de Traces. En bref, un beau spectacle à voir s’il passe près de chez vous !

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Faire la sieste sous les tropiques, parler littérature, théâtre et cinéma, écouter le craquement du glaçon plongé dans l'eau, frissonner avec Lovecraft, planifier des voyages en Italie... J'adore l'esprit rabelaisien, l'accent du sud-ouest et autres futilités de l'existence.

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